– DIGILADYZ ON THE ROCKS ! – Le numérique est en train de bouleverser l’économie et la société en France et dans le monde. Un tel changement pourrait sembler une opportunité de choix pour aboutir à la mixité homme/femme dans l’entreprise. Et pourtant, en France, ça coince encore. Pas une seule semaine ne s’écoule en territoire gaulois sans manifestation dédiée au digital version féminine, sans article sur la valeur et le capital performance que la mixité peut apporter à l’entreprise. On aurait pu croire que des dispositifs comme la French Tech ou des tendances de fond comme la startupmania, qui agite la France, représentent enfin l’occasion pour les Garçonnes de s’engouffrer dans une brèche positive vers les sommets de l’économie. Que nenni. Les pieds (et pas que talonnés) sont dans la porte, mais il y a encore du travail, à commencer par un changement culturel à initier d’urgence.

Les chiffres sont sans appel : selon l’étude Heys réalisée en collaboration avec France Digitale, 91% des startups hexagonales sont dirigées par des hommes.

A croire que ce que l’on reproche sans cesse et depuis des décennies aux entreprises traditionnelles et à l’industrie se répète inéluctablement dans la génération des entreprises du futur.

Dans un entretien accordé à l’AFP, Axelle Lemaire, Secrétaire d’Etat chargée du Numérique, fait un constat pour le moins négatif : » Clairement c’est préoccupant, on a l’impression d’être dans une phase de régression. Aujourd’hui en 2015, le constat que je suis obligée de faire, c’est que dans le secteur économique le plus porteur, celui qui crée des emplois et de la valeur, les femmes sont quasiment absentes « .

Aïe. Nos Garçons modernes seraient-ils pires que leurs papas ? Ne soyons pas sexistes, c’est terriblement old school. Plusieurs facteurs expliquent ce phénomène, et ce n’est pas qu’une question de testostérone.

L’éducation : seulement 5 à 10% des élèves ingénieurs sont des « ingénieuses ».

La filière technique et scientifique n’attire pas les filles. Question d’image, et d’orientation. Alors qu’il y a autant de filles que de garçons en section scientifique au lycée, elles s’envolent vers le commerce, la communication … Face à cela, les filles s’organisent : on connaît les associations Girls in Tech, née aux US et représentée en France par la tourbillonante Roxane Varza, Girlz in Web, fondées par Célina Barahona, Sabine Coulon et Lucile Reynard, et co-présidée par Marine Aubin qui vient de lancer le mouvement WondHer, mais un véritable mouvement est en train de s’opérer pour la promotion de cette filière par des femmes, au plus près du tissu économique local. Les organisateurs de GEM Digital Day sont clairement dans cette intention, et des acteurs majeurs du monde de la Tech affirment leurs position. C’est le cas de Syntec Numérique, qui a largement intégré la dimension féminine dans son action depuis plusieurs années, avec la commission Femmes du Numérique. Il y a quelques jours, Guy Mamou-Mani n’a pas hésité à affirmer sa position en faveur d’une plus juste représentation féminine dans le domaine de l’IT par tweet.

 Fabienne Billat, Présidente de Femmes du Numérique Rhône-Alpes / Photo DR
Fabienne Billat, Présidente de Femmes du Numérique Rhône-Alpes / Photo DR

Fabienne Billat, précise le sens de l’action de cette structure, notamment au sein des entreprises : « Femme et Numérique : ce sont deux sujets avec un champ d’investigation et une marge de progression qui ont de l’avenir ! En effet, le secteur du numérique, dans sa filière technologique est en pleine vigueur. Les écoles ont pris le pas, et permettront de combler les fortes demandes en PME.
Hélas, malgré leurs compétences avérées, les étudiantes se lancent peu dans ces cursus. Elles ne sont que 27,7% à exercer dans ce secteur, alors qu’elles y acquièrent dans leur parcours professionnel, des postes enviables : on compte deux fois plus de dirigeantes ici que dans le reste de l’activité économique.
Les actions des Femmes du Numérique vont dans ce sens : comprendre les freins, mener des actions d’information, soutenir des étudiantes, investir auprès des femmes chefs d’entreprise et toutes celles et ceux qui participent à ce déploiement. L’autre développement du numérique se joue à travers la culture. Tous les business croissent avec le digital : communication, marketing, commerce, ressources humaines etc. C’est un savoir être à acquérir, un savoir-faire à démontrer et là aussi, les femmes ont des atouts ! »

L’accès à la parité

La culture : combien de générations d’hommes se sont-elles succédées aux manettes politiques et économiques ? Combien de siècles ont-ils vu les femmes dans l’ombre, aux fourneaux ou au mieux en exceptionnelles secondes de leaders masculins ?

Comment se fait-il que les filles aient accès à l’éducation au même titre que les garçons, et qu’elles disparaissent du tableau au fur et à mesure des échelons ?

Christine Kelly a fait bouger les lignes au CSA / Photo DR
Christine Kelly a fait bouger les lignes au CSA / Photo DR

Il y a un véritable défaut de représentation des femmes dans la société aux fonctions clés du pouvoir politique et économique. Mais le problème réside également dans le relais de success-stories qui existent bel et bien. Car côté médias, pas mieux : il a fallu qu’une femme, Christine Kelly, intègre le CSA pour que ça bouge, (les grandes rédactions étant dirigées par des hommes), pour que les médias soient clairement invités à compter plus de femmes à leur tête (oui, nous chez « Garçonne », on n’a pas attendu).

Le site expertes.eu permet aux organisateurs d’événements et aux journalistes de trouver des expertes féminines dans tous les domaines. Pourtant, citez moi une entrepreneure phare en France. Langue au chat. Eh bien oui. Il n’y a pas d’entrepreneure omniprésente dans les médias. Il n’y a pas de Sheryl Sandberg en France (d’ailleurs elle n’est pas la vraie star de l’entreprise, juste la seconde de l’incontournable Mark Zuckerberg). Il n’y a que quatre ou cinq licornes qui ont la faveur des unes et des JT, jamais celles qu’on ira chercher au fin fond d’un accélérateur basé en région. Peut-être qu’en cherchant bien, les entrepreneures sont plus présentes qu’il n’y paraît ?

Céline Lazorthes, Leetchi revendique trois millions d'utilisateurs et emploie 30 personnes.
Céline Lazorthes, Leetchi revendique trois millions d’utilisateurs et emploie 30 personnes.

Même au niveau du « Pass French Tech », qui permet notamment d’accéder à du financement pour de futures pépites, sur les 48 startups sélectionnées, une seule, Leetchi est fondée par une femme, Céline Larzothe. Les Garçonnes, malgré leur énergie, sont cantonnées au statut de Poulidors de l’entrepreneuriat, et leur émergence, leur visibilité, est symptomatiquement érigée en « exception ». Stop !

La solution question représentativité repose sur un travail à 50/50 : oui les filles doivent frapper aux portes, être convaincues de leur égalité de compétences vis à vis de leurs collègues masculins, mais de leur côté, les hommes doivent ouvrir les portes qu’elles sont en train de pousser. A l’ère du « co » dans l’entreprise, la mixité doit être ZEU sujet de coopération. Alors que la facilité conduit à des logiques « d’homme à homme », il faut que les cultures d’entreprises bougent et que la mixité devienne un « sine qua non » à tous les échelons.

Ca tient sur la volonté de tous les entrepreneurs. Voilà un défi lancé aux nouveaux startupers en herbe, mais aussi aux anciens. France Digitale est co-présidée par un homme, Olivier Mathiot, président de Priceminister Rakuten et une femme, Marie Ekeland, VC issue de Criteo. Exemple à suivre question gouvernance et à confirmer par la filière numérique dans les actes !

Axelle Lemaire précise dans son entretien à l’AFP que la Grande Ecole du Numérique a vocation à intégrer 30% de femmes parmi les élèves. C’est un pas de géant, mais c’est encore trop peu à long terme.

Question de comportement et de volontés

Le progrès de la mixité sera atteint dès lors que tous les événements « Femmes du » « Femmes dans » « Truc au féminin » pourront disparaître. Quand le site « expertes.eu deviendra inutile. Quand Garçonne Magazine sera devenu plus niche que niche.

Pour le moment, la vocation de Garçonne Mag est de s’impliquer dans ce mouvement, pour accompagner la future et heureuse disparition de tout ce qui est encore peint en rose en opposition au bleu.

C’est ce que nous faisons au travers de notre partenariat avec le GEM Digital Day, qui met l’accent sur la mixité au travers d’une table ronde où vous retrouverez Fabienne Billat, Renaud Cornu-Emieux, et l’humble signataire de cet article 😉 le 1er décembre 2015.

A noter que Grenoble Ecole de Management s’implique sur la question, en favorisant les talents, au-delà des genres. Réussir la transition numérique française n’est pas affaire de sexe.

Renaud Cornu-Emieux, directeur de la Chaire digitale à GEM, organisateur du GEM Digital Day / Photo DR
Renaud Cornu-Emieux, directeur de la Chaire digitale à GEM, organisateur du GEM Digital Day / Photo DR

Renaud Cornu-Emieux, directeur de la Chaire Digitale de Grenoble Ecole de Management explique le point de vue de l’école :  » Il semble que l’on soit systématiquement obligé de parler du sujet femmes et « quelque chose » pour qu’une certaine parité soit atteinte. Ceci ne semble pas se faire naturellement. Et pourtant la mixité est le gage de projets qui avancent mieux, d’approches variées des sujets et des problématiques. C’est particulièrement vrai dans le numérique. En effet, Le numérique c’est avant tout des démarches relationnelles (un projet c’est 2/3 de relationnel et 1/3 de technicité). La place des femmes y est primordiale, votre apport Mesdames est crucial dans le bon déroulement des projets, dans le pilotage des transformations, dans la vision des enjeux…

Les études dans le numérique, c’est aussi pour les filles !

Aurore Besson, chargée du développement des relations avec les entreprises au sein de l’EMSI, l’école du numérique de Grenoble École de Management / Photo DR
Aurore Besson, chargée du développement des relations avec les entreprises au sein de l’EMSI, l’école du numérique de Grenoble École de Management / Photo DR

… Grenoble Ecole de Management s’inscrit dans cette démarche de promouvoir la place des femmes dans le numérique : grâce à la pugnacité d’Aurore Besson qui interviendra dans la table ronde sur les femmes dans le numérique lors du GEM Digital Day 2015, l’EMSI a participé aux trophées Excellencia 2015 organisés par « Femmes du numérique » et Pasc@line. La Chaire que je pilote se transforme en une Chaire des « Talents de la Transformation Digitale » et ce sujet des femmes dans le numérique sera l’objet des travaux que nous y mènerons. L’objectif est de comprendre les leviers qui permettront une plus grande place des filles dans les cursus du numérique qu’ils soient en école d’ingénieurs ou en écoles de management.

 

Vous l’aurez compris au travers de cet article, la vocation de Garçonne Magazine est bien de démontrer, par un éclairage sur celles qui créent (leur vie, leur entreprise, leur style) et ceux qui les soutiennent, en intégrant la mixité dans les critères de valeur de leur entreprise ou de leur projet.

Et oui, nous avons choisi le format digital car c’est le meilleur propagateur au monde. Bienvenue dans un monde de makers : un nom qui n’évoque ni le féminin ni le masculin, simplement la notion de faire. Faire la mixité homme/femme, question clé des prochaines années.

Photo à la Une « Femmes et numérique » © All Right Reserved

SourceGarçonne - Le Magazine
Virginie Debuisson
Virginie Debuisson est CEO de Pink in Black Media Group. Consultante en relations publiques pendant plus de 15 ans, elle a fait d’Internet son terrain de jeu, et des start-up ses chouchous. Curieuse, passionnée, volontiers impertinente pour lancer la réflexion, elle est passionnée par le monde des médias. Ambassadrice Pentalabbs (accélérateur de start-up basé à Orléans), Virginie est très impliquée dans la promotion de l’entrepreneuriat, notamment au féminin. Depuis juin 2015, elle dirige le groupe d’édition numérique Pink in Black Media, dont elle est co-fondatrice.

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